Association Les Amis de L'Isle Adam

A la recherche de l'ancien château fort de

L'Isle-Adam

 

  Rappel historique

A l'avènement du système féodal, à la fin du Xe siècle, le territoire français se couvre de châteaux forts. La plupart de ces châteaux sont à motte et basse cour. Leur mise en œuvre est avant tout un travail de terrassier et de charpentier. Dans un pays où les forêts ne manquent pas, le bois est le matériau le plus économique. Il est plus facile à employer que la pierre et demande une main d'œuvre moins qualifiée et corvéable. La motte est constituée d'une éminence artificielle plus ou moins élevée sur laquelle est érigé un donjon. Elle répond à des objectifs à la fois stratégiques et symboliques : une position dominante permettant de surveiller les abords, mais aussi un signal du pouvoir du tenant du fief, visible de loin. Si ces constructions présentent l'inconvénient d'être inflammables, elles sont aussi facilement reconstructibles. Seuls les grands seigneurs peuvent se permettre de faire construire un château en pierres, avec des moyens comparables à ceux utilisés pour la construction des cathédrales

     Sur l'île du Prieuré un première motte féodale a été construite vers 862 après l'édit de Pistres, peu avant l'incursion dans notre région des Vikings (qui deviendront les Normands après que le roi de France leur ait cédé cette province de son royaume). En 885, ceux-ci remontent  l'Oise jusqu'à Beaumont et incendient au passage la motte féodale de L'Isle-Adam et détruisent le village de Nogent. Probablement reconstruite après que le calme soit revenu dans la région, c'est cette motte que trouvera Adam 1er de l'Isle vers l'an mil lorsque le roi Robert le Pieux  lui confie la garde du passage de l'Oise contre de nouvelles incursions possibles des Normands.


     Les premiers textes connus qui évoquent le château fort de l'Isle-Adam, sans en préciser sa composition, remontent à 1014 (manuscrit latin 15437 à la BnF), date à laquelle Adam 1er fera construire en face de son château un prieuré pour recevoir les reliques de Saint-Godegrand. Le fils de ce seigneur, Adam II de l'Isle, va occuper des fonctions importantes à la cour des rois Henri 1er et Philippe 1er. Il sera successivement Échanson, Connétable, puis Sénéchal en 1079. C'est donc probablement lui qui fera construire le château fort en pierres, toujours sur le même emplacement. Une charte de 1092, signale que le seigneur résidait dans la tour (donjon) de son château, avec son fils et sa bru. Ses successeurs étendront probablement les fortifications pour améliorer le système de défense. On ne sait pas à quelle époque sera creusé le bras du Cabouillet, créant ainsi une île artificielle (devenu l'île de la Cohue) pour améliorer la défense du château côté L'Isle-Adam.

En 1357, les Anglais prennent la forteresse de L'Isle-Adam qui appartient alors à Guillemette de l'Isle ; celle-ci n'est pas en mesure d'affronter ces nouveaux envahisseurs. Le château sera libéré par les seigneurs du Vexin.

     En 1364, Pierre de Villiers achète la seigneurie de L'Isle-Adam à sa cousine Guillemette de Luzarches. Il fera construire avec son épouse Jeanne de Beauvais, dans l'enceinte de son château, une chapelle dédicacée aux apôtres Pierre et Paul. Cette famille de seigneurs va donner de grands serviteurs du royaume. Pendant la guerre de Cent Ans, Anglais et Bourguignons vont tour à tour écumer la région. Mais Jean de Villiers de L'Isle-Adam, maréchal de France, va successivement servir le duc de Bourgogne, puis le roi d'Angleterre et enfin le roi de France. Ces voltes faces diplomatiques lui permettront de mettre à l'abri des attaques son château de L'Isle-Adam. En 1527, Charles de Villiers, le dernier descendant de cette illustre famille, cède sa seigneurie à son cousin le connétable Anne de Montmorency. Celui-ci, fera démolir le vieux château fort (à l'exception de la grosse tour), devenu inconfortable, pour construire à la place un château d'agrément dans le style Renaissance. Cette tour fera encore parler d'elle pendant les "guerres de Religion". En effet, en 1589, alors que Henri 1er de Montmorency se trouvait dans la province du Languedoc dont il était gouverneur, les Ligueurs s'emparent du château de L'Isle-Adam. Il faudra qu'Henri IV en personne viennent les déloger.

     Enfin en 1709, François Louis de Bourbon-Conti fera détruire le dernier vestige du château fort (la grosse tour) pour construire à la place la bâtiment de la conciergerie. Ce château aura donc vécu pendant près de 7 siècles.

 

     Des fouilles archéologiques en 2005

La municipalité de L'Isle-Adam s'est porté acquéreur en 2004 du domaine dit "Conti", situé dans l'île du Prieuré, de façon à conserver ce patrimoine historique où se sont succédés pendant plus d'un millénaire les différents châteaux des seigneurs de l'Isle-Adam. Son projet est de réhabiliter les lieux en vue de les ouvrir au public.

     En mars 2005, elle a fait appel au Service régional d'archéologie d'Ile-de-France pour connaître les risques archéologiques du site. La réalisation de l'opération de diagnostic a été confiée en août à l'INRAP (Institut National de Recherche Archéologiques Préventives) qui est intervenu sur le terrain du 3 au 13 octobre. Le but de l'opération était de vérifier s'il restait des traces des différents châteaux.

 

   


     8 tranchées ont été effectuées de façon à quadriller l'ensemble du terrain. Trois d'entre-elles se sont révélées positives. Le nombre de structures découvertes reste faible et le mobilier archéologique rare.

     A l’emplacement présumé de la grosse tour du château fort, un sondage a permis de mettre à jour un fragment de mur dont il n'a pas été possible d'évaluer la largeur compte tenu des contraintes de la tranchée effectuée. On peut penser que ce mur pouvait avoir une largeur supérieure à deux mètres. Des fouilles plus détaillées seraient nécessaires pour confirmer l'hypothèse qu'on est bien sur l'emplacement de cette grosse tour.

 

Réflexions sur l'ensemble des fouilles effectuées

Le réseau de galeries


Le sous sol de ce domaine comporte un important réseau de galeries, dans l'ensemble en bon état. Ce réseau a été inventorié et relevé par le service de l'Inspection Générale des Carrières (IGC) à Versailles. Mais les fouilles récentes ont fait apparaître d'autres galeries qui ne débouchent plus sur le réseau connu ; les entrées ont été obturées mais nous n'en connaissons pas la raison ni l'époque. La plupart de ces galeries sont du XVIIe ou du XVIIIe siècle. Chose curieuse, dans les différents documents de l'époque des Conti, il n'y est jamais fait allusion.

     Quelle était leur fonction ? Probablement un rôle de service. En effet les domestiques du prince n'avaient pas le droit d'emprunter la cour d'honneur du château. En particulier le ravitaillement des cuisines était acheminé par ces galeries. Il est aussi possible que certaines de ces galeries aient réutilisé des anciennes galeries du château fort ? mais là une étude complémentaire est nécessaire. Ces fouilles ont aussi permis de déterminer comment les galeries ont été construites. Le sol de la cour est constitué de remblais sur au moins deux mètres de profondeur. Cela confirme que les galeries ont été construites à ciel ouvert et ensuite le sol a été remblayé pour constituer la cour d'honneur du château.

 


 

 

Un mur traverse la cour d'Est en Ouest

     Les fouilles ont aussi fait apparaître, sur une longueur de 10 mètres, un mur en pierres de taille calcaires liées à l'aide d'un mortier fin. Sa largeur est d'environ 70 cm d'épaisseur. Ce mur parfaitement conservé,  se situe à une profondeur de 0,8 m sous le sol actuel. Quelques pierres sont des remplois.

     Le mode de construction de ce mur semble indiquer qu'il pourrait être du XVIe ou du XVIIe siècle. Manifestement ce mur est postérieur à l'époque du château fort. Par contre il pourrait appartenir à des constructions réalisées par Anne de Montmorency vers 1560.    

     Il serait intéressant de réaliser des fouilles complémentaires sur ce mur de façon à déterminer sa hauteur véritable, mais aussi sa longueur.  En descendant jusqu'à ses fondations on pourrait peut-être retrouver des matériaux archéologiques qui permettraient de le dater avec plus de précision et de déterminer son rôle.

 

     Les informations de cette rubrique s'appuient sur le rapport de diagnostic réalisé en novembre 2005 par Nathalie Karste, archéologue à l'INRAP

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